Sonnet n°1, titre à débattre

Faisant fi des chichis et des préliminaires
Au jeu d'un corps merdeux qui éjacule et pète,
Il faudrait donc redire ce que l'on voulait taire:
C'est son propre étonnant et inconnu des bêtes

Comment donc le savoir, et comment donc le dire?
En un cycle éternel et pour nous rassurant,
Tout au moins est-ce ici le fond de son désir,
N'est-ce-pas l'esprit grivois du peuple de tout temps?

Dans le cœur interdit des rondelles intestines,
Une blonde en sous-tif, debout, jambes écartées.

Aucune étrangeté en ce monde anonyme,
En son sein une foule de travailleurs crevés,

Aux absurdes contraintes des revendications,
Il faudra renoncer à la pénétration.

 

Sheila  Lühte-Finnal

 

 

--------------------- Tentative d’exégèse par Z.P -----------------------

 

. Le premier quatrain signifie que l'on dit au corps que le jeu consistant à « éjaculer et péter » (de cette manière spécifique là) est le propre de l'homme - ce qui est fort profond – et, on l'imagine, ce que la suite va nous révéler. Mais on hésite d'un bout à l'autre : comment cela va t'il être pris ? Certes il faut dire la vérité et faire "fi des chichis et des préliminaires" comme autant de masques et mensonges - mais ne risque t'on pas de se méprendre et de réduire la révélation poétique à autre chose qu'elle-même : "l'esprit grivois du peuple de tout temps", esprit mal entendu, car un tel "esprit grivois" est ici potentiellement réévalué. Soit qu'il soit, en lui même et négativement, échappement à la vérité : désir de se rassurer en un cycle éternel et clos afin d'échapper à l'obscure vérité qui ici se déploie - mais en même temps désir suppose savoir : le même esprit du peuple refuse le dire (il faut donc le redire) derrière l'appellation "grivoise" qui masque la profondeur et ainsi notamment la différence ontologique (de l'homme et de la platitude-bestialité, réduction à ce que posons comme être-animal). L'ambiguïté de la position du peuple est ici fort profonde.

. Voici donc la vérité sur ce corps merdeux qui éjacule et pète, elle suit naturellement :

. "Dans le cœur interdit des rondelles intestines, une blonde en sous-tif, debout, jambes écartées. Aucune étrangeté en ce monde anonyme, En son sein une foule de travailleurs crevés, Aux absurdes contraintes des revendications, Il faudra renoncer à la pénétration". Dans le cœur de la vérité, qui fait le fond du jeu de notre corps pétant et éjaculant - il y a donc le fantasme (ou phantasthme) figuré par la « blonde en sous-tif, debout, jambes écartées ». Fantasme grossier comblant le manque mais, produit du Kopros, le même pour tous et, par là, anonyme - masquant la division sociale (renonciation aux revendications) dans un idéal de jouissance et d'orgasthme dont le sens précis est : "il faudra renoncer à la pénétration" autrement dit : tu ne jouiras pas. Autrement dit encore : voici un beau poème dont le sens global est de nous éclairer sur ce qui se joue dans les parties basses et néanmoins envoûtantes du corps - rien de plat ni de simplement (pour autant que ce soit simple) animal - mais une logique du fantasme connue et méconnue dont le sens global, proprement idéologique, est de promettre la jouissance, soit le dépassement de la division sociale tout en l'interdisant. On comprend ainsi - et tout ça se termine très adéquatement par la signature de l'auteur que Sheila Lühte-Finnal nous appelle à la libération (du phantasthme) et la révolution.